La figure du dieu Tonapa, ornant la Porte du Soleil de Tiahuanaco |
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Vingt-cinq îles parsèment sa
surface; côté péruvien,les plus importantes sont
celles de Taquile et d'Amantani, à la sortie de la baie de
Puno, toutes deux peuplées de petites communautés
agricoles. Côté bolivien, se trouvent les deux
îles légendaires de Titicaca (ou île du
Soleil) de Coati (ou île de la Lune) sur
lesquelles les incas avaient bâti des temples et des
monastères; un détroit d'un kilomètre et demi
les sépare. Sauf au nord et au sud, le lac est bordé de
collines qui s'élèvent en pente douce; sur certains
points, sur l'île de Coati par exemple, le rocher tombe
à pic dans les flots.
On conçoit d'autant mieux que ce lac avec ses îles, ses
ruines mystérieuses et les monuments édifiés
durant la préhistoire qui parsèment ses rives, ait
été le berceau des mythes sacrés et des dieux
des habitants des hauts plateaux. De nos jours, sur le promontoire de
Copacabana, face à l'île du Soleil,
s'élève un célèbre sanctuaire. C'est
là que, chaque année, au mois d'août, des
milliers d'Indiens de la Puna et des hautes vallées se rendent
en pèlerinage.
Les indigènes eux-mêmes sont ici plus étranges
qu'ailleurs, dans la région riveraine du lac Titicaca
habitaient encore au début du 20e siècle. des tribus
primitives auxquelles Aymaras et Quechuas vouaient jadis un profond
mépris: les Uros et les Chipayas. L'une et l'autre de ces
races ont aujourd'hui disparu, même si à Puno des
indiens vivent encore sur des "îles flottantes" faites de
roseaux tressés en s'intitulant Uros
: ils ne sont là qu'à des fins purement
touristiques.
le
site de Tiahuanaco Le Palais des Sarcophages
est une autre structure très intéressante de
Tiahuanaco. Cette construction semi- souterraine
était jadis entourée par un double mur. La
structure dite "Posnansky", à l'est du Kalasasaya,
également à demi-souterraine, est
constituée de pierres levées et de petits
blocs. Des têtes-trophées apparaissent
sur les murs.
Les monuments s'étendent
sur un haut plateau désolé, où la
végétation, rare et parsemée, est
caractéristique de la triste et monotone puna .
La structure principale, ou Acapana, qui se trouve sur un
monticule naturel, constituait jadis une pyramide à
étages, de 210 mètres de côté sur 15
mètres de hauteur. Cette formidable construction fut
peut-être une forteresse, d'autant plus que l'on observe, dans
la partie supérieure, une dépression, ayant sans doute
fait office de réservoir d'eau, le Kalasasaya, qui
occupe une superficie de 18000 m2, délimitée par des
blocs taillés, semblables à des menhirs.
C'est en cet endroit que se trouve la fameuse Porte du Soleil
, la plus célèbre des pierres sculptées de
Tiahuanaco. Il s'agit, comme son nom l'indique, d`une porte ouverte
au centre d'un bloc de 4 metres de large sur 3 mètres de haut.
L'importance de celui-ci ne tient pas seulement à sa masse
imposante, mais surtout aux frises sculptées dans la partie
supérieure, représentant un personnage central, de
petite taille et à la tête immense : les yeux sont
verticaux, du visage irradient des serpents et divers autres motifs,
dont nous ignorons la signification symbolique. Le personnage, que
l'on a assimilé au dieu Tonapa, porte, dans ses mains
à quatre doigts, deux sceptres, termines en têtes
d'oiseaux. Le tout repose sur une sorte de pyramide.
Au sud de cette dernière, Bennett découvrit en
1932 un gigantesque monolithe (7,30 m de hauteur), qui porte
aujourd'hui son nom : le monolithe de Bennett . Il
s'agit d'une statue représentant un personnage
entier, dont le corps est gravé de motifs de pur
style Tiahuanaco. La structure de Puma-Puncu, ou
"Porte du puma", consiste en différentes
plates-formes, formées de grands blocs de pierre. Il
se peut que ces ruines aient constitué un centre
religieux, où les pèlerins venaient, à
certaines périodes, collaborer à sa
construction. Les carrières, situées parfois
à plus de cinq kilomètres de distance,
laissent supposer un travail collectif d'une ampleur
colossale.
La
culture de Tiahuanaco-Huari
et son expansion andine
partir du 8e siècle, la culture de Tiahuanaco va
essaimer dans certaines régions du Pérou, sans
que l'on puisse déterminer avec exactitude la route
suivie. Ses premiers foyers semblent être les zones
d'Ayacucho, Ica, Pachacamac. Dans la sierra centrale, elle
essaima vers Huanuco et jusque dans les terres des indiens
Chachapoyas, probablement en descendant le cours du rio
Maranon. On ne sait exactement si cette expansion est
dûe à une poussée - forcément
belliqueuse - des gens de race et de langue Aymara, ni
quelle en serait la cause. Irradié a l'origine vers
Ayacucho, et amalgamé à la tradition locale
Nazca, le nouveau style est désigné sous le
nom de Huari
(ou Wari), du nom du site proche de l'actuelle Ayacucho,
où il fut étudié, dans la
Cordillère centrale. Celui-ci se diffuse sur toule la
côte, tout en se transformant peu à peu. Il
couvre peu à peu tout le Pérou et se dote
d'une forte structure politique que l'on a appellé
"empire Wari".
Vase de style Tiahanuaco-Huari
Décadence
de Tiahuanaco
C'est alors que
resurgissent d'autres styles régionaux, trouvant leur
personnalité propre (Chimu, Chancay, Ica Chincha, Collao), qui
disparaîtront à leur tour devant l'expansion incaC'est
seulement après la disparition de l'hégémonie
culturelle de Tiahuanaco sur le haut-plateau que semblent avoir
été élevées dans la région ces
imposantes tours funéraires appelées chullpas.
Rondes ou carrées, elles sont faites de pierres
appareillées ou grossièrement taillées; la
chambre mortuaire se trouve la plupart du temps à
l'intérieur de la tour, mais les tours de pierres
grossières sont en général pleines et
s'élèvent au-dessus de la tombe proprement dite,
creusée dans le sol. Il se peut que le type à chambre
souterraine soit d'époque pré-incaïque, l'autre
étant postérieure.
près
une centaine d'années d'expansion, la culture de
Tiahuanaco passe par une période de décadence
d'une durée indéterminée,
caractérisée par un style de céramique
dit "Tiahuanaco décadent", pour finalement se
perdre dans des modalités régionales. Dans
cette dernière phase, nous remarquons des traits
particuliers, comme l'usage de trois couleurs pour former
des dessins geométriques.
Le lac
sacré des Incas
Nous n'avons aucune indication
précise sur l'époque à laquelle les Incas
arrivèrent sur les bords du lac. On sait seulement que l'Inca
Pachacutec
conquit le royaume des Collas
et le récit que le chroniqueur Sarmiento de Gamboa fait de
cette conquête cadre d'ailleurs avec les donnéees
chronologiques. Toutefois, bien avant le règne de Pachacutec,
les chroniques font de Mayta
Capac le maître de cette
région.
Il semble, à en juger par de nombreux indices, que les Incas
étaient apparentés aux Collas. Qui sait même si
Collas et Incas n'étaient pas un seul et même peuple?
Ils auraient emmené vers le nord le dieu protecteur de leur
tribu; plus tard, oubliant leurs origines, ils seraient revenus en
conquérants dans leur ancienne patrie.
Cette tradition était si vivace que la tradition officielle
inca faisait de la région du Titicaca ]e berceau de la
race. Garcilaso de la Vega écrit à ce propos
:
"Lorsque l'Inca Manco Capac comprit le parti qu'il pouvait
tirer de la vieille légende, selon laquel1e le soleil avait
lui pour la premiere fois au-dessus de l'île (Titicaca), et
qu'il s'aperçut que, pour les Indiens, le lac et l'île
étaient des dieux sacrés, il inventa un second mythe:
lui-même et sa femme étaient les enfants du soleil. Leur
père les avait envoyés sur cette île pour
instruire les hommes et les gouverner dans leur propre
intérêt... Sur la foi de ces Iégendes, les Incas
et les peuples qu'ils avaient soumis considéraient l'île
comme un sanctuaire. Ils y édifièrent un magnifique
temple consacré au soleil, aux murs couverts de plaques d'or;
chaque année, les provinces de l'empire y envoyaient des
offrandes d'une valeur considérable, sous forme d'or et
d'argent, pour remercier le dieu-soleil des bienfaits qu'il leur
avait dispensés au cours de l'année. Le temple
était aussi magnifique que celui de Cuzco. Outre les
métaux précieux servant à fabriquer les objets
du culte, l'île contenait de telles quantités d'or et
d'argent que les récits qui s'y rapportent sont trop
fantastiques pour correspondre à la
réalité".
La statue du dieu-soleil, dont le culte fut
instauré par l'Inca Pachacutec, prit place, à
côté de celle de Viracocha, dans le sanctuaire de
l'île Titicaca, en même temps qu'il faisait
édifier, sur l'île voisine de Coati, un grand
couvent de vierges du Soleil (acclahuasi) qui devint un des
plus importants de tout l'empire. Il en subsite encore d'imposants
vestiges.
Très ancienne tribu, distincte des
aymaras et des quechuas, qui habitait sur les rives du lac Titicaca
jusqu'au début du 20e siècle. On ignore à peu
près tout de leur origine qui se confond avec la mythologie du
grand lac sacré. Certains américanistes voient en eux
la dernière branche du peuple Puquina chassés
des haut-plateaux par les invasions Aymaras vers la fin du 12e
siècle.
Les chroniqueurs Herrera et Acosta rapportent que, vivant sur des
radeaux de roseaux, ils suivaient les bancs de poissons. Non sans
mal, les missionnaires parvinrent à les fixer sur les rives du
Titicaca. Leur réputation de
paresse et de saleté était solidement établie;
le Père Calancha raconte qu'il est plus facile d'attirer un
brochet hors de son repaire que d'arracher un Uro à ses
roseaux. Selon Anello Oliva, ils étaient si paresseux que,
pour les obliger à travailler, l'Inca Roca les astreignit
à lui verser un impôt sous forme de puces : "L'Inca
Roca, écrit-il, ordonna à ces fainéants d'Uros,
peuple d'oisifs et bouches inutiles, de lui livrer, chaque mois. en
guise de tribut, des roseaux pleins de puces à raison d'un par
individu; cela dans le seul but de les empêcher de ne rien
faire...". L'histoire ne dit pas ce que l'Inca pouvait bien faire,
ensuite, de cette pouilleuse contribution!
Les Uros étaient des êtres farouches, au teint presque
noir. Ils parlaient un idiome très particulier, vivant
exclusivement entre eux. On leur doit l'invention des barques de
roseaux, les balsas
de totora, si étroites
qu'un seul homme y trouve place et encore à condition de
rester agenouillé. Sur ces esquifs, les Uros partaient
à la pêche pour s'assurer de leur seul et unique moyen
de subsistance...